jeudi 27 mai 2010

Bas les masques!

Depuis la chute du gouvernement fédéral, et l’émoi compréhensible que cela a suscité à travers tout le pays, tous les analystes et responsables politiques ont déclaré, à juste titre, que les prochaines élections seront cruciales quant à l’avenir du pays et à notre modèle de vivre ensemble. On pouvait donc légitimement s’attendre à ce que les partis politiques se positionnent clairement sur leur vision du futur de la Belgique. On en est malheureusement loin et ce au grand dam de l’électeur qui devra poser un choix déterminant le 13 juin prochain.
Du côté flamand, la campagne s’articule autour du concept de confédéralisme qui est employé à tort et à travers dans les médias et les interviews politiques. Il sert en fait d’outil marketing pour éviter le mot « séparatisme », qui reste rejeté par une large majorité en Flandre, et pour promouvoir un nouveau modèle destiné à remplacer le « fédéralisme » qui ne correspondrait plus à la réalité belge. Pour s’en convaincre, il suffit de voir que même la N-VA de Bart De Wever se déclare à présent en faveur du confédéralisme alors que chacun sait que son objectif final est la fin du pays. Son but est ici d’élargir au maximum sa base d’électeurs potentiels, quitte à totalement tromper les citoyens.
En réalité, le confédéralisme correspond à la signature d’un Traité entre plusieurs Etats indépendants qui décident d’exercer certaines compétences en commun (une monnaie unique ou une armée par exemple). Par conséquent, il n’y aurait plus d’élections fédérales (plus de Chambre donc) ni de sécurité sociale commune. En d’autres mots, c’est un système dénué de légitimité démocratique et de solidarité entre concitoyens. Comme l’Histoire nous l’a montré, un tel « machin » ne peut tenir la route plus de deux ans car il devient totalement ingérable. Est-ce donc cela que les partis flamands entendent par « confédéralisme » ? Sans doute que non, à part la N-VA, mais que mettent-ils alors dans cette notion vide qui n’a d’autre dessein que de brouiller les cartes vis-à-vis de l’électeur ?
Du côté francophone, même si ce modèle confédéral est unanimement rejeté, la clarté n’est pas pour autant de mise. Plusieurs partis se déclarent pour l’unité du pays, ce qui est très bien, et certains utilisent même abondamment les couleurs nationales dans leur campagne. Mais avec quel message ? Quel modèle proposent-ils ? De ce côté-là, c’est globalement le flou artistique qui prédomine. On me répondra sans doute qu’il ne faut trop ouvrir son jeu avant d’affronter les décisives négociations communautaires de l’après 13 juin et qu’il vaut mieux garder quelques « cartouches » de réserve. Ce serait évidemment un non sens démocratique de raisonner de la sorte. Cela signifierait en fait que le 2e tour des élections fédérales belges se déroulerait à nouveau durant tout l’été derrière les grilles de Val Duchesse. Au-delà de l’amère impression de « déjà vu », ce procédé exclurait d’un revers de la main tous les citoyens de la discussion qui, je le rappelle, portera sur l’avenir de leur pays !

Comment donc obtenir cette transparence nécessaire à tout vote judicieusement posé? En posant les bonnes questions et en réclamant des réponses tranchées sans verser dans le simplisme. Je propose dès lors que les cinq questions suivantes soient posées aux présidents de partis de l’ensemble des formations, au Nord comme au Sud, se présentant au prochain scrutin fédéral.

1. Acceptez-vous le principe d’une grande réforme de l’Etat ?
2. Souhaitez-vous maintenir l’ensemble de la sécurité sociale au niveau fédéral ?
3. Acceptez-vous de refédéraliser certaines compétences sur base du critère d’efficacité ?
4. Soutenez-vous l’idée d’une circonscription électorale fédérale ?
5. Acceptez-vous de réaliser des concessions durant les négociations sur les problèmes institutionnels (BHV, nomination des bourgmestres, frontière linguistique,…)?

Le panel de réponses possibles étant systématiquement oui ou non, on ne peut faire plus direct. Par ailleurs, et c’est probablement le plus remarquable, les partis répondant positivement à toutes ces questions pourront s’asseoir, entre eux, autour de la table en sachant que leurs partenaires de négociations sont raisonnables et aspirent au même objectif : réformer le pays sans idéologie et au bénéfice des 10 millions de Belges.

On sait déjà que le Vlaams Belang, la N-VA, voire le FDF, réagiront de manière négative car ils sont incapables de négocier avec l’autre Communauté. Pour le reste, difficile de dire quel parti se placera dans une telle configuration. Mon intime conviction est que la famille verte (Ecolo et Groen !) s’inscrira dans un tel schéma. Quelle est la vôtre ? Répondre à cette question devrait fortement influencer votre geste citoyen des prochaines semaines.

2 commentaires:

  1. Félicitation Gilles. Il est essentiel que ces questions soient posées et que ton billet soit largement diffusé.

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  2. Concernant les partis francophones, ils répondent oui à toutes les questions à mon avis sauf :
    question 4 : le PS
    question 5 : le FDF (et donc le MR)

    Mais rien que le fait qu'ils se prononcent clairement sur ces points convaincrait peut-être les flamands de ne pas voter NVA pour forcer les francophones à la réforme.

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